SOLE, le projet fou d’une école dans les nuages

 

Une «École dans les nuages», voici un nom qui laisserait rêveur plus d’un élève ! Cette idée futuriste a commencé à germer il y a déjà plusieurs années dans l’esprit de Sugata Mitra. C’est en 1999 que débutent les premières investigations de cet enseignant originaire de Calcutta en Inde. Son idée, créer un apprentissage «auto-organisé» permettant à un groupe d’enfants bénéficiant d’une connexion internet de pouvoir apprendre «presque» tout par eux-même!

 

Son premier projet « Hole in the wall » littéralement le «trou dans le mur» constitue un concept d’éducation novateur. Fort des résultats observés auprès de ses apprenants (meilleure dynamique de groupe, comportement en classe amélioré, accroissement des apprentissages…), Sugata Mitra continue à mener des recherches rigoureuses durant 4 ans en partant du constat qu’en groupe, les enfants apprennent par eux même sans aucune intervention directe de l’enseignant. Le chercheur construit ainsi le concept novateur d´une «éducation mini-invasive».  Ainsi, grâce à des stations d’apprentissage, les élèves vont entrer dans un processus d’exploration, de découverte et de coaching entre pairs. Cette méthode d’apprentissage s’appuie sur la curiosité naturelle des élèves grâce à la création d’un environnement favorable où ils vont pouvoir apprendre par eux même. Les élèves vont grâce à une expérimentation libre acquérir des compétences critiques en résolution de problèmes. Cette méthode vient en complément des méthodes d’apprentissages traditionnelles offrant ainsi une expérience d’éducation hollistique à chaque élève.

Au bout de quatre années de recherches scientifiques les résultats tombent :

• Apprentissages croissant chez les élèves
• Pérennisation des acquis sur le long terme
• Curiosité et implication des élèves décuplées
• Dynamiques et interactions dans le groupe améliorées

Et le constat incroyable que les enfants peuvent presque tout apprendre par eux même.

Ne ratez pas cette conférence passionnante de Sugata Mitra où il explique toute l’histoire de l’école dans les nuages.

(Les sous-titres en français sont disponibles en cliquant ici)

À l’issue de cette conférence, Sugata a remporté un prix TED d’un million de dollars afin de récompenser ses efforts novateurs et audacieux pour faire progresser l’apprentissage des enfants dans le monde. Grâce à cette bourse, le chercheur a pu réaliser son rêve : construire « School in the Cloud » ou l’école dans les nuages dans laquelle les enfants pauvres ou riches peuvent s’engager et se connecter avec les informations et le mentorat en ligne. Sept écoles laboratoires dans le Cloud ont ainsi été construites : 5 dans des coins reculés d’Inde et deux en Angleterre.

• Voici ses explications :

Son constat après son prix au TED2013

Par la suite en 2014, une plateforme « School in the Cloud » a été créée afin d’aider tous les collaborateurs du projet ( qu’ils soient enseignants, parents, leadeurs…) partout dans le monde à partager et à gérer leurs expérience SOLEs.

• Rendez-vous ici pour découvrir leurs aventures :

https://www.theschoolinthecloud.org/about/

Projet école Afrique:

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Mais alors un SOLE qu’est ce que c’est exactement ?

« Un environnement d’apprentissage autonome, ou SOLE, peut exister partout où il y a un ordinateur, une connexion Internet et des étudiants qui sont prêts à apprendre. Au sein d’une SOLE, les étudiants ont la liberté d’apprendre en collaboration en utilisant Internet. Un éducateur pose une grande question et les élèves forment de petits groupes pour trouver une réponse.

Pendant une session SOLE, les étudiants sont libres de se déplacer, de changer de groupe et de partager des informations à tout moment. Vers la fin d’une séance, ils ont l’occasion de partager ce qu’ils ont appris avec l’ensemble du groupe. Les sessions SOLE se caractérisent par la découverte, le partage, la spontanéité et l’intervention limitée des enseignants. »

Qu’est-ce qu’une grande question ?

« Les Grandes Questions sont l’étincelle qui déclenche une session SOLE. Poser une question intéressante et pertinente stimule l’imagination et la curiosité des enfants et les entraîne dans un véritable processus de découverte. L’élaboration d’une bonne grande question peut aussi être la partie la plus difficile de l’organisation d’une session SOLE.

Les Grandes Questions sont celles qui n’ont pas de réponse facile. Elles sont souvent ouvertes et difficiles ; elles peuvent même être sans réponse. L’objectif est d’encourager des conversations longues et approfondies, plutôt que de trouver des réponses faciles.

Ces questions encouragent les enfants à proposer des théories, à travailler en collaboration, à utiliser la raison et à faire preuve d’esprit critique. Une bonne grande question relie plus d’un sujet : « Qu’est-ce qu’un insecte ? par exemple, ne touche pas autant de sujets différents que « Qu’arriverait-il à la Terre si tous les insectes disparaissaient ? ». »

Définitions tirées du site www.theschoolinthecloud.org

Vous l’aurez compris aucune « grande question » ne se ressemble. Elles sont le reflet des expériences scolaires et personnelles des élèves. Elles peuvent toucher des domaines totalement différents : les sciences, les émotions, les faits d’actualités…elles sont le reflet notre curiosité insatiable.

Les savoirs acquis lors d’une session SOLE dépassent la simple recherche de « la bonne réponse », elles constituent un véritable moteur dans l’apprentissage des méthodes de recherche, du débat, de la construction de l’esprit critique.

Un mentorat sans frontière

Conscient que dans le processus d’apprentissage la part émotionnelle est importante pour les enfants, Sugata Mitra a créé un concept inédit le «Granny Cloud» littéralement les «grands-mères nuages». Le chercheur est parti de l’idée que les grands-mères ont quelque chose de réconfortant par leurs mots doux, leur compassion, leur amour communicatif mais aussi par la multitude d’interrogations qui émanent d’elles face à un monde qui change constamment, perturbe et questionne leurs repères. Ces grands-mères nuages sont là pour les enfants partout dans le monde, jusque dans les endroits les plus reculés pour encourager les enfants et créer ainsi un environnement où ils vont pouvoir s’épanouir! Tout cela est possible grâce à la magie d’Internet par une simple connexion sur Skype! Dans les faits, ces incroyables grands-mères ont entre 24 et 78 ans, des femmes et des hommes bénévoles simplement désireux d’encourager et d’accompagner des enfants dans leur quête du savoir.

Comment se déroule une session SOLE

Aucune session SOLE ne se ressemble. Ses formes divergent et s’enrichissent des inspirations et dynamiques que souhaite impulser chaque enseignant. Cependant, avant de se lancer dans cette grande aventure d’investigation, voici quelques règles pour vous aider à débuter.

Pour réaliser votre session SOLE, il vous faut :

• Un espace collectif pouvant accueillir entre 20 et 30 personnes

• Un ordinateur, tablette ou même téléphone bénéficiant d’une connexion Internet par groupe de travail, composé généralement de 4-5 élèves

• Une grande question

Le déroulement :

1. Présentation et introduction de la session SOLE : les règles de fonctionnement.

L’enseignant prend à chaque début de session 3-4 minutes pour rappeler les règles de fonctionnement à la classe.

• Les élèves forment des groupes de travail de 4-5 élèves.

• Chaque groupe élit un capitaine dont le rôle sera de réguler les interactions au sein de l’équipe.

• Durant la session, on a le droit de parler et de changer de groupe quand on le souhaite.

• On a le droit de copier les recherches des autres groupes.

• On est libre de mener nos recherches où on le souhaite.

• À la fin de la session, chaque groupe doit donner une réponse.

2. La « Grande Question »

Ce temps (entre 5 et 10 min) correspond à la deuxième phase de la session SOLE dédiée à l’élaboration de la grande question qui va susciter la curiosité des participants.

• Pour choisir la grande question, plusieurs choix s’offrent à l’enseignant. Il peut choisir lui-même la grande question ou demander à chaque groupe ou chaque élève de rédiger une grande question et en piocher une pour la session, ou encore demander à chaque groupe de rédiger entre 2, 3 ou 4 questions et lors d’une mise en commun voter tous ensemble pour n’en choisir qu’une. L’enseignant peut aussi choisir en fonction de la discipline qu’il est entrain de travailler de sélectionner une thématique. Par exemple, les droits de l’homme en éducation civique ou l’environnement en sciences…

3. La démarche d’investigation.

Cette phase est la plus longue de toute la session et dure entre 20 et 45 min en fonction du profil de la classe.

Durant ce temps, les élèves travaillent en groupe et disposent d’un ordinateur pour trouver les réponses à leur grande question. L’eneignant peut aussi faire le choix de varier les supports en alliant recherche informatique et l’accès à la bibliothèque de la classe.

4. Mise en commun.(10 à 20 minutes)

Chaque groupe partage ses conclusions et la classe élabore ensemble un consensus de réponse.

Les réponses de chaque groupe peuvent en fonction des moyens de la classe être filmées, présentées oralement ou à l’aide d’un support manuscrit telle une affiche. Il en est de même pour l’élaboration de la réponse commune.

Petit coup de pouce pour les difficultés que l’on peut rencontrer lors d’une session SOLE :

Problème	Solution envisagée	Résultat
L’un des participants se plaint que son groupe est en train de semer la pagaille.	Rappelez à tous qu’ils peuvent changer de groupe lorsqu’ils le souhaitent.	Prise de conscience par le participant que l’absence d’intervention de l’enseignant amène à devoir apprendre à communiquer les uns avec les autres pour résoudre les problèmes.
Un participant est distrait et désintéressé	Demandez au capitaine s’il peut faire quelque chose pour motiver le participant qui est distrait. C’est le moment idéal pour rappeler à tous qu’ils peuvent changer de groupe ou voir ce que font les autres groupes.	Les participants vont prendre conscience petit à petit qu’ils ont la capacité de prendre des décisions et de changer la situation eux-mêmes.
Un groupe complet n’effectue pas la tâche.	Rappelez au groupe qu’ils doivent présenter leurs conclusions publiquement à la fin de la session.	Les participants comprennent ainsi l’importance de choisir une équipe avec laquelle ils peuvent travailler. Ils prennent conscience de la responsabilité qu’ils ont de présenter leur réponse pour contribuer à la connaissance collective
Un groupe présente des réponses fausses ou non pertinentes.	Encouragez les autres participants à remettre en question ces réponses, par exemple: « Quelqu’un a-t-il trouvé quelque chose de différent? » Puis, engagez une discussion sur les raisons pour lesquelles ils ont proposé des réponses différentes, en les associant à la fiabilité des sources.	Les participants apprendront à s’interroger, à discuter des réponses, à filtrer les informations obtenues, à comprendre ce qui rend les éléments de preuve pertinents, à analyser de manière critique les sources Internet.
Les participants ont du mal à lire les informations en ligne.	Puisque les élèves peuvent avoir différents niveaux de compréhension, encouragez-les à consulter d’autres groupes pouvant avoir des lecteurs plus habiles ou qui ont trouvé des pages plus accessibles. Toujours leur demander d’expliquer leurs découvertes avec leurs propres mots au lieu de les lire directement à partir d’une source sur Internet.	Les élèves ne considéreront pas la lecture comme une barrière. Cela réduira l’anxiété au moment de devoir présenter des informations lors de la restitution.
Le capitaine a un comportement inapproprié.	Proposez des suggestions utiles et des conseils sur la manière de gérer et de traiter avec le groupe. Essayez de ne pas confronter le commandant de bord devant ses compagnons.	Le capitaine développera de la confiance en soi et de bonnes habitudes sociales. Le comportement du groupe s’améliore et l’intervention de l’enseignant est réduite.
Certains participants se plaignent de ne rien avoir à faire car un des membres utilise l’ordinateur.	Rappelez-leur qu’ils peuvent changer de groupe. Pendant le feedback, demandez aux participants ce qu’ils pensent de devoir partager des ordinateurs et discutez des solutions futures.	Les participants apprendront à développer leurs propres solutions, à gérer leurs relations.
Les participants ont trouvé rapidement la réponse et semblent mener le trouble.	Encouragez les participants à se déplacer dans l’espace et à regarder ce que d’autres groupes ont trouvé. S’ils ont des informations différentes, demandez-leurs s’ils peuvent expliquer pourquoi ou les inclure dans leur réponse. Demandez-leurs s’ils sont convaincus que leur réponse est correcte et demandez-leurs davantage d’informations sur les questions qu’ils mentionnent dans leurs réponses. Les inviter à inclure des dessins sur leurs panneaux d’affichage.	Les participants apprennent à développer leur propre apprentissage en comprenant qu’une «réponse» n’est pas la fin du voyage et qu’ils sont eux-mêmes une source de curiosité. En les motivant à dessiner, ils recherchent des sources d’images et élargissent ainsi leur recherche.
Les participants retranscrivent directement les informations trouvées à partir de la première source.	Demandez aux autres membres du groupe s’ils ont compris ce qu’ils lisent. Leur demander d’expliquer leurs découvertes avec leurs propres mots au lieu de les copier directement d’une source sur Internet.	Les participants découvrent qu’il ne s’agit pas de trouver une réponse, mais de comprendre. Ils découvrent également que ce que vous appréciez, ce sont leurs propres mots ou idées.

*traduit du site www.solecolombia.org 

On vous invite dès à présent à venir découvrir la fabuleuse aventure SOLE que nous avons eu la chance de vivre aux quatre coins de la Colombie.

L’article a été rédigé par Coralie Delcol, professeur des écoles et membre du bureau de l’association IMAGO.

*Les photographies utilisées ci-dessus proviennent des sites: www.hole-in-the-wall.com et www.solecolombia.org